GRANDS LACS, L'INSTABILITÉ CHRONIQUE
Et maintenant le Rwanda. Alors que beaucoup l’annonçait sur
le départ, certains évoquant même l’hypothèse d’une candidature de son épouse,
Jeannette Kagamé, Paul Kagamé ne semble pas, lui aussi prêt à quitter le
pouvoir à l’issue de son mandat en 2017.
La constitution actuelle, adoptée en 2003, limite les mandats à deux et donc, interdit au président rwandais de se représenter. Jusque-là le chef de l’État ne s’est pas encore prononcé, mais l’idée commence à germer. Dans une tribune publiée dans la presse locale, trois petits partis proches du pouvoir réclament un referendum sur la modification de la loi fondamentale afin de maintenir leur champion à la tête de l’État. Pour eux, Paul Kagamé est le sauveur de la nation. Il est une chance dont le Rwanda ne peut pas se passer.
2015, 2016, 2017, les années charnières…
Ce débat au Rwanda, s’il y en aura un dans ce pays où la liberté d’expression s'est pas garantie, fait échos à d’autres tensions qui secouent déjà la région. En RD Congo voisine, le débat sur le projet de modification de la loi électorale a fait plusieurs dizaines des morts en Janvier 2015. Le texte a été finalement adopté sans son alinéa controversé qui liait les prochaines élections au recensement de la population et que l’opposition soupçonnait de manœuvres pour prolonger le mandat du président Joseph Kabila qui expire le 19 Décembre 2016. C’est dans ce contexte que le président de la Commission Électorale Nationale a publié jeudi le calendrier des élections. La très réclamée présidentielle, ainsi que les législatives sont finalement prévues le 27 Novembre 2016. Voilà de quoi apaiser davantage les esprits. Resteront maintenant, les questions. Que va faire la majorité, qui pour succéder à Joseph Kabila. Alors que le Palu d’Antoine Gizenga a pris ses distances ces derniers jours avec la coalition présidentielle, le MSR de Pierre Lumbi et l’ARC d’Olivier Kamitatu se sont montrés à plusieurs reprises hostiles à l’idée d’un troisième mandat pour le chef de l’État, sans oublier la métaphore des faux penalties de Moise Katumbi, c’est une véritable guerre de tranchée qui risque d’ébranler le pouvoir.
En RDC la situation se clarifie. Pas au Burundi. A Bujumbura, Pierre Nkuruziza tient coute que coute à briguer un nouveau mandat en juin 2015. Le président burundais s’accroche sur une disposition de la constitution qu’il juge floue. Pas sûr que cela fonctionne. Mercredi, le collectif des associations de la société civile l’a invité à suivre l’exemple de Joseph Kabila, tout en prédisant la violence en cas de candidature pour un 3eme mandat.
À Chaque décennie ses problèmes…
Loin d’être la seule région à être touchée par l’instabilité politique, la région des grands lacs est quand même marquée par une série d’évènement ces dernières décennies. 1994, le génocide contre les tutsi au Rwanda, a des répercussions sur toute la région, la chute du Marechal Mobutu en 1997, l’assassinat de Laurent Désiré Kabila en 2001, jusqu’à l’accord global et inclusif signé à Pretoria le 17 Décembre 2002 entre Kinshasa, le RCD, le MLC et l’opposition politique. Une décennie meurtrière qui a fait des centaines des milliers de morts, des viols et des millions des déplacés. En 2007, le schéma monstre de 1+4 rend son verdict redouté à Kinshasa. Les troupes de Jean Pierre Bemba et la garde républicaine s’affrontent en pleine capitale faisant de nouvelles victimes et inaugurant une nouvelle décennie d’incertitude. Car dans la foulée, ce qui était autre fois le Rassemblement Congolais pour la Démocratie s’est mué en Congrès Nationale pour la Défense du Peuple (CNDP), puis en M23, dans un éternel recommencement téléguidé à chaque fois, selon plusieurs rapports, y compris ceux des Nations Unies, par le Rwanda, l’Ouganda et parfois le Burundi.
Aujourd’hui, c’est une nouvelle décennie qui s’ouvre, celle des élections, Celle-ci comme d’autres auparavant, laissera aussi des traces.
Yvon MUYA
6 commentaires - GRANDS LACS, L'INSTABILITÉ CHRONIQUE
Cependant, je doute avec conviction que les choses se soient précisées a Kinshasa a la suite de la publication par la Ceni du calendrier électoral tant exigé.
Quand bien même le respect des délais constitutionnels soit pris en compte, j'ai peur pour les contraintes pratiques liées a la technicité de l'organisation, aux décaissements financiers et aux responsabilités partagées au niveau interne sur la production et la promulgation des lois essentielles y afférentes ...
Le rapporteur de la Ceni a pris soin de le dire pour que personne ne soit pris de court. Une certitude au moins, c'est que Kabila ne pourra pas se représenter.
Au-dela, de l'experience congolaise sur la gestion du temps et des chiffres, on est loin de croire sur l'effectivité de ce calendrier tres serré, il faut le reconnaitre!